Yves Lebreton
Revue de presse

"Obstination"

PARIS. LE MONDE. Nicole Zand. 18.10.1969.
"Ils présentent à la Biennale un spectacle pour quatre mimes intitulé 'Obstination', passionnante introduction à la connaissance d'un travail très personnel qui, en dehors des modes et de la virtuosité tape-à-l'oeil, créé un langage fondé exclusivement sur le déplacement des corps. Du magma vibrant des acteurs agglutinés, naissent des lignes, des phrases, des affrontements avec divers obstacles qui s'opposent ou aident à la continuité dynamique. Il faudra suivre le travail de la compagnie d'Yves Lebreton, qui s'inscrit exactement dans l'optique de la Biennale ; c'est une recherche pure qui pourrait, à plus ou moins long terme, déboucher sur une nouvelle esthétique de l'art de la scène, au même titre, peut-être, que les recherches d'un Craig, d'un Meyerhold, d'un Artaud, d'un Grotowski ou d'un Decroux".

MONTPELLIER. LA DÉPÊCHE DE MIDI. Yves Marc. 26.05.1970
"Une première démonstration de cette nouvelle technique est faite, fort brillamment, par Yves Lebreton, au cours d'une première partie consacrée notamment à l'évocation des quatre éléments. Sa stupéfiante maîtrise technique fait reculer les limites des notions généralement liées à l'expression corporelle. À l'inverse des artifices souvent employés par le mime pour rendre plus figuratifs ses modes d'expression, Yves Lebreton ne se sert que fort peu de ses mains et de son visage. Semblant échapper à l'emprisonnement de l'espace, du temps et de son propre poids, son corps se laisse aller aux forces intérieures qui l'animent. De l'accablement douloureux à la violence explosive, les mouvements paraissent obéir aux impulsions d'une vie intérieure intense, dont les ressorts psychiques se tendent et se détendent au rythme des muscles.
Afin que l'expérience soit complète, le Studio II propose ensuite, dans le même esprit et avec la même rigueur, un jeu pour quatre mimes sur le thème de l'obstination. Comme Yves Lebreton, Ingemar Lindh, Gisèle Pélisson et Maria Lexa possèdent une technique remarquable qui permet à l'ensemble de se jouer, ici aussi avec une prodigieuse virtuosité, des lois de l'équilibre. Sur le plan esthétique, la réussite est encore plus totale. Solidaires les uns des autres jusqu'à ne former qu'un seul bloc, engagés totalement dans la recherche authentique de ce qui les lie et de ce qui les oppose, les corps évoluent dans le propre espace qu'ils créent, et ceci dans un silence envoûtant qui oblige à retenir son souffle. Et l'0n éprouve vite l'indéfinissable impression d'appréhender une sorte de vérité originelle qu'un monde de conventions et d'apparences nous avait jusqu'alors cachée".

MILAN. SIPARIO. Franco Quadri. 28.05.1970.
"Un nouveau prophète pour un nouveau théâtre. C'est Yves Lebreton fondateur du groupe Studio 2. Sa conception du théâtre naît de la théorie du 'mime abstrait' d'Etienne Decroux. À la base se situe le corps... l'acteur se propose de créer un théâtre non-figuratif basé exclusivement sur des rapports d'énergie. Sur cette voie, le premier travail de groupe 'Obstination' arrive à une expression dramatique ; les évolutions des quatre corps se cherchent, se composent et se décomposent selon les dessins d'une géométrie limpide qui correspond parfaitement aux tensions d'une recherche vers un élément commun ; le discours technique épouse celui de la métaphysique".

VENISE. IL GAZZETTINO. G. A. Cibotto.13.05.1970.
"Un corps sur la scène : vibrations et esprit.
Spectacle raffiné d'Yves Lebreton à la rencontre des Théâtres de recherche à la Biennale de Venise.
Définir ce qu'Yves Lebreton et les trois autres interprètes ont su exprimer et suggérer dans le bref moment d'une heure et demie est presque impossible, pour la simple raison qu'ils ont su inventer un nouveau langage libre dans un espace où chaque référence qui n'appartient pas à l'imagination dans son acception la plus vive et spontanée, est exclu. Ils ont su offrir le miracle d'une émotion pure pour qui est encore capable d'en saisir le sens... ".

NEUCHÂTEL. L'EXPRESS NEUCHÂTEL. 24.10.1969.
"Il y a une virtuosité technique sans faille, une maîtrise du corps absolu, l'élimination de toutes les entraves et de tous les obstacles qui s'opposent à la liberté des mouvements. Mais ces qualités, si elles éveillent l'admiration, ne sauraient expliquer à elles seules cette communication intense entre les mimes et leur public. La virtuosité n'est pas une dimension spécifiquement humaine. Ce que les mimes du Studio 2 ont révélé avant tout, c'est l'engagement où la moindre tension ou détente des muscles est la traduction immédiate d'une impulsion psychique ; où chaque attitude extérieure reflète un état intérieur profondément vécu ; un engagement qui est sincérité de tous les instants, vérité qui démasque et manifeste l'homme dans sa dimension d'authenticité".

GOTEBORG. KVALLSTIDNINGEN. Sune Ornberg. 03.02.1072.

"La fascination qui naît de ce spectacle est celle qui naît toujours d'une maîtrise parfaite".

GOTEBORG. GOTEBORG HANDELS. Sverker Andreason. 03.02.1072.

"Nous voyons chaque muscle travailler. Chaque respiration devient sensible. Le plus petit mouvement du corps peut être chargé d'une force explosive. C'est un art d'expression scénique basé sur l'essentiel et qui tend à retrouver le plus petit dénominateur commun du langage théâtral. Un art qui avec sobriété exprime la totalité et s'ouvre sur l'universel. La pièce principale s'intitule 'Obstination'. Quatre acteurs. Quatre têtes, huit bras, huit jambes qui semblent appartenir à un seul et même corps. Les corps s'enroulent et glissent en suscitant des luttes violentes et des caresses intenses. Des forces obscures les pressent les uns contre les autres puis les séparent brusquement. Malgré une composition rigoureuse où chaque mouvement s'inscrit dans une partition commune, la sensation qui se dégage de cette mise en forme scénique est celle d'une totale liberté. Dans un silence absolu, c'est une musique corporelle, un art qui est à la fois austère, centré sur ses propres moyens d'expression et ouvert à tous ceux qui désirent y prendre part".

MALMO. KVALLSPOSTEN. Henrik Sjogren. 29.01.1970.

"Il s'agit d'un art gestuel dense et minutieusement élaboré. Un homme seul ouvre le spectacle. Il se meut selon des rythmes puissants et lents avec des décharges nerveuses surprenantes, envahissant progressivement le tronc et les membres.
Lorsque les quatre mimes s'amalgament à l'intérieur d'un même magma, d'une même boule, l'action se fait plus complexe. Un amoncellement de corps à l'intérieur d'un même mouvement respiratoire, une fosse à serpent. Les visages sont concentrés, vides d'expression, les corps s'enroulent et s'emboîtent comme les éléments d'une machine. Mais à l'intérieur de cette apparente mécanique perdure un rythme humain intérieur, une structure parfaite bien que semblant issue du hasard. C'est à la fois fascinant et étrange par son originalité unique".